La jeune fille parle beaucoup.
Elle ponctue ses phrases de sourires immodérés.
On craint que ses pommettes ne cessent plus de grimper sur son visage. Recouvrent ses yeux de peau. De paupières éternelles. On craint qu'elle se noie dans le confort de l'insouciance, l'illusion de la commodité.
Une gêne vient peu à peu en l'écoutant. On ignore d'où elle vient. On cherche, on perd de le fil de la discussion. Et brusquement ça nous vient -elle est absente de sa parole, comme en retrait. Elle n'y croit pas. C'est une parole responsable, résolue, sérieuse. Morte.
Elle annonce: l'Ami est mort.
Aussitôt on l'étreint, on pleure pour elle. On lui parle, une phrase d'un quart d'heure, une phrase sans respiration, d'un seul tenant.
La jeune fille nous regarde. Elle nous regarde et elle apprend la nouvelle à son tour: elle pleure.
Elle récupère les déchets des jours, cartouches de sa plume.